Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/10

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dération que beaucoup plus tard. Elle renonce provisoirement aux résultats définitifs et se contente de tracer, de l’image du monde, les seuls traits qui lui paraissent établis avec certitude, laissant aux recherches futures le soin de compléter le tableau. Cette attitude trouve son expression la plus caractéristique dans la célèbre définition de la mécanique due à Gustave Kirchhoff : « La mécanique est la description des mouvements ayant lieu dans la nature. »

Ces deux méthodes se complètent mutuellement et jamais on ne peut se passer d’aucune d’elles dans la recherche physique. Mais ce n’est pas cette méthodologie double que je me propose d’étudier ici ; ce que je voudrais, c’est plutôt attirer l’attention sur une question d’importance plus principielle, je veux dire la question de savoir à quels résultats a conduit jusqu’à présent cette dualité de méthode et quels fruits on peut penser la voir produire dans l’avenir.

Personne ne peut contester que le développement de la physique a été dans le sens du progrès, de telle sorte que chaque décade a amélioré notre connaissance de la nature. À défaut de toute autre preuve, un simple regard jeté sur l’importance et sur le nombre toujours croissant des inventions qui mettent la nature au service de l’homme, suffirait à nous en convaincre. Mais quelle est, dans l’ensemble, la direction qui a été suivie par le progrès ? Dans quelle mesure peut-on dire que l’on s’est vraiment rapproché du but ?

Pour celui qui se tient au courant du progrès de la science, telle est la question à laquelle il importe avant tout de répondre.

Ce premier point, une fois élucidé, nous serons par là-même en état de trancher la question, actuellement si disputée, de savoir ce que l’on veut dire au fond, quand on parle d’une représentation physique de l’univers. Est-ce que cette représentation ne serait qu’une construction de notre esprit appropriée à son but, mais somme toute, arbitraire ; ou bien au contraire devons-nous admettre que cette image du monde est la reproduction fidèle de phénomènes naturels tout à fait indépendants de nous ?

Pour déterminer la direction suivie par l’évolution de la physique, il n’y a qu’un moyen : c’est de comparer l’état