Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/209

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impressions sensibles, elle doit se borner à nos impressions personnelles du fait que ces impressions constituent les seules données immédiates dont nous disposions. Mais il n’est à la portée de personne de constituer une science complète à l’aide de ses seules impressions personnelles : cela est tout à fait évident. En conséquence, ou bien il faut renoncer à l’acquisition d’une science de quelque étendue, ou bien il faudra en venir à un compromis en vertu duquel les impressions qui nous sont étrangères devront concourir, elles aussi, à l’édification de la science et c’est là une extrémité à laquelle le positivisme le plus strict ne voudra guère se résoudre, car elle équivaut à une renonciation à maintenir son point de vue, d’après lequel les données primitives et immédiates sont seules à avoir le droit de cité dans la science. Une autre conséquence de ce même compromis sera l’introduction d’un facteur nouveau. La crédibilité des témoignages soit oraux, soit écrits, qui nous viennent d’autrui, doit intervenir dans la définition de la science. Le principe fondamental du positivisme « n’admettre que des données incontestables » se trouve donc être, logiquement battu en brèche.

Passons néanmoins sur cette difficulté et admettons que tous les témoignages au sujet des phénomènes physiques soient dignes de foi ou, si l’on veut, admettons qu’il existe un critérium infaillible permettant de distinguer les témoignages dignes de foi de ceux qui ne le sont pas. Il restera que tout physicien présent ou à venir, pourvu qu’il soit honnête, aura un droit strict à ce que ses impressions personnelles soient prises en considération ; car il n’existe aucune raison d’exclure certaines impressions plutôt que d’autres. Il serait notamment tout à fait injustifié de ne prêter que peu d’attention aux dires d’un savant sous prétexte que ses collègues ne sont pas arrivés à éprouver les mêmes impressions que lui.

À ce point de vue, on ne saurait comprendre ni justifier comment on ignore complètement à l’heure actuelle les rayons dits « N » découverts par le physicien français Blondiot en 1903. René Blondiot, professeur à l’université de Nancy, était certes, un expérimentateur excellent et digne de confiance et sa découverte était pour lui une impression personnelle, tout comme les découvertes d’autres