Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, III et IV.djvu/535

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sonne. — Certainement. — Celui qui n'a besoin [215b] de personne ne saurait s'attacher. — Non. — Ne s'attachant pas, il ne peut aimer. — Non. — Ne pouvant aimer, il ne peut être ami. — Non, cela est clair. — Comment donc voulons-nous que se forme l'amitié entre les gens de bien, si, absens, ils n'ont pas besoin les uns des autres, puisque chacun d'eux isolé se suffit à soi-même, et si, présens, ils ne se sont d'aucune utilité ? Le moyen que de tels hommes se soucient beaucoup l'un de l'autre ? — Je ne le conçois pas. — Se souciant [215c] si peu l'un de l'autre, ils ne sauraient être amis. — Il est vrai. — Vois donc un peu, Lysis, dans quel panneau on nous a fait donner ! Notre principe a bien l'air de n'être pas faux à demi seulement. — Comment cela ? — Il me revient en ce moment à l'esprit d'avoir entendu quelqu'un soutenir que le semblable est en guerre avec le semblable, les gens de bien avec les gens de bien. Mon homme mettait en avant le témoignage d'Hésiode, qui dit quelque part :

Le potier fait ombrage au potier, le chanteur au chanteur,
[215d] Et le mendiant au mendiant[1].

Et en général il ajoutait que plus les choses sont

  1. Hésiode, Les œuvres et les jours, v. 25.