Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, I et II.djvu/258

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un raisonnement à toute épreuve. Je n’aurai donc point de honte de te faire des questions, puisque tu le permets, et je ne m’exposerai pas au reproche que je pourrais me faire un jour de ne t’avoir pas dit maintenant ce que je pense. Quand j’examine avec moi-même et avec Cébès ce qui a été dit, j’avoue que je ne trouve pas cela très satisfaisant.

[85e] Peut-être as-tu raison, mon ami, mais en quoi ne trouves-tu pas cela satisfaisant ?

En ce que, répondit Simmias, l’on pourrait dire la même chose aussi de l’harmonie d’une lyre, de la lyre elle-même et de ses cordes ; que l’harmonie d’une lyre bien d’accord est quelque chose d’invisible, d’incorporel, de très beau, [86a] de divin ; et que la lyre et les cordes sont des corps, de la matière, des choses composées, terrestres et de nature mortelle. Car enfin, après qu’on aurait cassé ou coupé par morceaux la lyre, ou qu’on aurait rompu les cordes, on pourrait soutenir avec ta manière de raisonner qu’il est de toute nécessité que cette harmonie existe encore, attendu qu’il est impossible que la lyre subsiste après les cordes rompues, ou que les cordes fragiles et mortelles subsistent après la lyre cassée ou démontée, et [86b] que l’harmonie, chose immortelle et divine, périsse avant ce qui est mortel et terrestre ; on pourrait soutenir qu’il