Et si tu étais dans un vaisseau battu de la tempête, à qui t’abandonnerais-tu, toi et ce que tu as avec toi, au philosophe ou au pilote ?
Au pilote, sans contredit.
Et dans toute occasion, tant qu’on aura l’homme de la chose, le philosophe ne sera pas fort utile ?
Il me le semble, répondit-il.
[136e] Et par conséquent, repris-je, le philosophe est un homme très inutile ; car dans chaque art nous avons des hommes habiles, et nous sommes tombés d’accord qu’il n’y a que les habiles qui soient utiles, et que les autres sont inutiles ?
Il fut forcé d’en convenir.
Oserai-je encore te demander quelque chose, lui dis-je, et n’y aura-t-il point de l’impolitesse à te faire tant de questions ?
Demande-moi tout ce qu’il te plaira, me répondit-il.
Je ne veux que convenir de nouveau de [137a] tout ce que nous avons dit. Il me semble que nous sommes convenus d’un côté, que la philosophie est une belle chose ; qu’il y a des philosophes ; que le philosophe est habile ; que les gens habiles sont utiles, et les malhabiles inutiles : et de l’autre côté, nous sommes également tombés d’accord que les philosophes sont inutiles, tant