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PHÈDRE

l’Éginétique, qui traitent de délicates questions d’intérêt ; le dernier avait même ceci de particulier qu’il concernait un problème de droit international privé, puisque c’était à Égine que se jugeait le procès et que le client d’Isocrate était d’ailleurs. Dans d’autres, c’est la politique d’Athènes qui est évoquée ; ainsi dans le discours Sur l’attelage, écrit vers 395 pour le fils d’Alcibiade, et qui est un éloge de ce dernier en même temps qu’un raccourci, assez partial bien entendu, des faits auxquels Alcibiade avait été mêlé. Quelque fructueux que fût le métier, Isocrate n’y trouvait pas cependant la satisfaction de traiter de grands sujets, ni celle de parler en son propre nom (Antidosis 46-48). Peut-être alors eût-il aimé se consacrer activement à la politique de son pays ; mais il manquait des dons naturels indispensables : la force et la souplesse de la voix, l’assurance et même la hardiesse (Antid. 189 sq.). Il se tourna donc vers le professorat et, vers 393, il ouvrait une école de rhétorique.

Dès lors ses écrits seront des discours épidictiques. Celui qui s’intitule Contre les Sophistes (vers 390) est un programme de son enseignement, en opposition à ce qu’on faisait dans d’autres écoles concurrentes. L’Hélène et le Busiris sont des « modèles » du genre « éloge », proposés à l’imitation de ses élèves et à l’admiration découragée de ses rivaux. Enfin Isocrate aperçoit, dans cette même voie, un moyen de satisfaire ses ambitions déçues : il va devenir un écrivain politique ou, comme on dit parfois, un publiciste. Il s’attaque d’abord au thème, déjà traité par Gorgias et par Lysias[1], de la concorde entre les Grecs ; il le développe avec éclat en 380 dans son Panégyrique d’Athènes : si Lacédémone voulait faire sincèrement sa paix avec Athènes, l’union de ces deux États ferait celle de toute la Grèce contre l’ennemi naturel, le Barbare d’Orient, dont la faiblesse avérée garantit à l’entreprise les meilleures chances de succès. Puis, Lacédémone persévérant dans sa politique hargneuse et despotique, ce n’est plus contre le Grand Roi, c’est contre elle qu’il veut réaliser l’union ; le résultat peut avoir été, en 377, la formation de cette nouvelle Confédération athénienne qu’animait une pensée, non d’hégémonie, mais de justice. Désormais Isocrate suit les événe-

  1. Cf. p. xiv sq., et p. xvii n. 2. Sur les antécédents, voir le ch. iii, de G. Mathieu op. cit.