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s’était répandue à travers tout le monde grec ; dans les fêtes locales, comme dans les grandes solennités religieuses de caractère panhellénique, avaient lieu des concours de rhapsodes. Ils existaient anciennement à Sicyone, où ils furent supprimés par Clisthène[1] ; plus tard, Sparte, la Crète, les colonies doriennes de Libye en instituèrent à leur tour[2]. Enfin ces concours devaient être particulièrement nombreux et brillants dans les cités ioniennes d’Asie-Mineure qui avaient été le berceau de la poésie épique.

Les récitations rhapsodiques étaient en usage à Athènes avant le vie siècle, s’il est vrai qu’elles furent réglementées par Solon, qui leur imposa un ordre suivi[3]. Hipparque, fils de Pisistrate, décida, dit-on, que les poèmes homériques seraient récités d’un bout à l’autre aux grandes Panathénées[4].

L’activité des rhapsodes n’était pas limitée à Homère : Socrate félicite son interlocuteur de vivre dans la compagnie de « beaucoup de bons poètes[5] ». Mais, comme il l’indique aussitôt lui-même, les poèmes homériques étaient leur principale étude. Ils allaient de ville en ville, s’exhibant dans les fêtes et les concours. Ion d’Éphèse vient d’Épidaure, où il a remporté le prix aux Μεγάλα Ἀσκλαπίεια, et il s’apprête à concourir aux grandes Panathénées. En dehors de ces occasions solennelles, on avait souvent à Athènes l’occasion d’entendre les rhapsodes, s’il faut appliquer à leurs récitations

    Syracuse, vers l’olympiade 69 (?). Voir schol. Pind. Ném. II, 1 ; cf. Eustathe, ad Il., p. 6.

  1. Hérodote, V, 67.
  2. Maxime de Tyr, XXIII, 5. — Des inscriptions béotiennes, d’Orchomène et de Thespies, mentionnent les rhapsodes vainqueurs au concours des Chariteisia et à la fête des Muses, aux iie et ier siècles avant J.-C.
  3. Diogène de Laërte, I, 2, 57.
  4. Pseudo-Platon, Hipparque, 228 b. L’indication est d’ailleurs suspecte, car la même phrase attribue à Hipparque le mérite d’avoir le premier introduit à Athènes les poèmes d’Homère. Lycurgue, C.  Léocrate, 102, rappelle qu’une loi des ancêtres réserve à ces seuls poèmes l’honneur d’une récitation régulière aux grandes Panathénées.
  5. Ion, 530 b. Chamæléon, cité par Athénée, XIV, 620, 12, disait dans son livre sur Stésichore que les rhapsodes, outre les poèmes d’Homère, « chantaient » encore ceux d’Hésiode, Archiloque, Mimnerme, et Phocylide.