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NOTICE

cation étymologique. Il considère apparemment les représentants de cette famille comme les produits d’une génération anormale, car il explique chaque nom par le caractère de son possesseur, et, au lieu de commencer par le fondateur de la race, il débute par Oreste pour remonter à Tantale, puis Zeus, Kronos et Ouranos. Du premier principe posé il n’est plus question (393 ab).

Arrivé au bout de cette première série d’explications étymologiques, Socrate s’émerveille de sa propre sagesse. Hermogène renchérit sur cette admiration : Socrate semble avoir été brusquement saisi par l’inspiration, et il s’est mis à « rendre des oracles » (396 cd).

C’est avertir assez clairement le lecteur du peu de crédit qu’il doit attribuer à ce qui précède. Platon indique ailleurs ce qu’il pense de l’inspiration, capable tout au plus de rencontrer l’opinion droite, mais dépourvue de toute valeur scientifique. Or, d’où vient l’inspiration de Socrate ? Il l’attribue lui-même à Euthyphron, avec qui il s’est longuement entretenu le matin du même jour. Nous connaissons, par le dialogue auquel il a donné son nom, ce devin d’Athènes, esprit étroit et dévot jusqu’au fanatisme, qui se donnait à la fois pour un inspiré et pour un docteur en matière de religion. Les gens le tenaient pour un fou et se moquaient de lui[1]. Et Socrate, en réfutant sa conception de la piété, lui démontre dans cet ouvrage qu’il n’entend rien aux choses dont il discourt. On voit par là quelle est la qualité de l’inspiration derrière laquelle s’abrite Socrate, et le cas qu’il peut en faire lui-même[2]. Il ajoute d’ailleurs un commentaire significatif : demain « il exorcisera cette sagesse divine et s’en purifiera » (396 e). Enfin, pour achever d’éclairer le lecteur sur ce qu’il doit penser des étymologies précédentes, il remarque, au moment de reprendre son exposé, que les noms donnés aux héros et aux dieux risquent de fourvoyer, et il en donne les raisons (397 b).

  1. Euthyphron, 3 b.
  2. O. Apelt, Platons Dialog Kratylos, 1922, Einleitung, p. 13.