Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome V, 2.djvu/39

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
33
NOTICE

contre le second, que le mouvement doit être compté comme une des formes nécessaires de l’être[1]. Ainsi, sans nier le mouvement, Platon refuse d’en faire l’unique principe de la réalité, et d’admettre que tout soit dans un écoulement perpétuel[2].

III

LES PERSONNAGES DU DIALOGUE

On convient en général que la composition du Cratyle n’offre pas la belle ordonnance ni l’équilibre si sensibles dans d’autres dialogues platoniciens. On s’est montré surtout choqué du développement disproportionné donné à la partie étymologique[3]. Platon croyait avoir ses raisons ; mais il est certain que du point de vue artistique l’économie de l’œuvre en a souffert[4].

Le Cratyle n’est d’ailleurs pas dépourvu de valeur dramatique. Cette valeur résulte du plan même de l’ouvrage et des revirements successifs qu’offre la marche du dialogue. Elle est sensible dès le début, qui s’ouvre avec une brusquerie pleine de vivacité. Après le premier entretien, on peut croire la recherche terminée : il a donné raison à Cratyle contre Hermogène. Or voici que l’enquête est reprise, et aboutit à justifier partiellement la thèse d’Hermogène contre Cratyle. Sommes-nous arrivés au terme ? Non, car Platon fait voir que les deux thèses ont en fait peu d’intérêt, puisque la vraie connaissance des choses ne doit pas être demandée aux noms. À l’intérieur même des développements se

  1. Édition du Sophiste par A. Diès, Notice, p. 289-290.
  2. Horn, o. l., p. 63.
  3. C’est une des raisons qu’invoquait Schaarschmidt (Ueber die Unechtheit des Dialogs Kratylos (Rhein. Mus., XX, 1865) pour nier l’authenticité du Cratyle. Cucuel s’est efforcé de réfuter cette thèse par des arguments qui ne sont pas toujours très solides, notamment (p. 25) en expliquant les imperfections de l’œuvre par sa date. Aujourd’hui, surtout depuis la démonstration donnée par Th. Benfey et Lehrs, personne ne met en doute l’authenticité du dialogue (Th. Gomperz, o. l., II, p. 587, note).
  4. Wilamowitz, o. l., p. 297 ; cf. Horn, o. l., p. 36.