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LETTRE II

fruit de ces efforts. Platon recommande à son disciple cette patiente et difficile enquête qui, poursuivie avec constance, aboutit aux résultats désirés. Mais que Denys évite les indiscrétions et se garde d’écrire ses découvertes. Lui, Platon, n’a jamais écrit. Tout ce qui passe pour être son œuvre est celle de Socrate au temps de sa belle jeunesse.

L’épistolier termine en priant son correspondant de brûler cette lettre après l’avoir soigneusement lue et relue, et, dans une sorte de post-scriptum, sollicite quelques faveurs.


La doctrine secrète.

La mystérieuse formule concernant les trois principes a de tous temps intrigué les interprètes de la lettre. Tandis que certains ont vu là un indice évident de l’inauthenticité de l’épître, d’autres ont cherché dans les Dialogues des termes de comparaison. Depuis les Alexandrins, on a essayé diverses exégèses.

Les écrivains chrétiens ont cru deviner chez Platon comme un pressentiment de la Trinité, mais pressentiment très vague, intuition vacillante, bien pauvre clarté : « Ceux qui ont tenté d’interpréter la pensée de Platon, disait Eusèbe de Césarée, expliquent le Premier par Dieu ; le Second, par la Cause ; le Troisième, par l’Âme du monde, la désignant aussi comme troisième Dieu. Mais les lettres divines assignent comme principe la sainte et Bienheureuse Trinité, Père, Fils et saint Esprit[1]. »

Les modernes ne s’accordent pas sur l’identification de chacun des termes de la triade. Apelt assimile le Premier à la divinité ; le Second, aux Idées ; le Troisième, à l’âme du monde[2]. Howald pense, au contraire, que les trois réalités sont, suivant l’ordre, les Idées, le sensible, la matière, et compare notre formule à celle de Timée, 52 a et suiv.[3]. Andreae croit reconnaître, à son tour, les trois degrés de la connaissance, et l’âme humaine tend vers le troisième degré, la νοήσις[4].

S’il faut attribuer un sens à l’énigmatique formule, ne

  1. Praeparatio euangelica, XI, 20.
  2. Apelt, Platons Briefe, p. 115, n. 16.
  3. Howald, Die Briefe Platons, p. 186.
  4. Andreae, Die philosophischen Problem in den platonischen Briefen, in Philologus, 1922.