Page:Platon - Apologie de Socrate ; Criton ; Phédon (trad. Chambry), 1992.djvu/122

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prouvé que toutes les choses naissent de cette manière, c’est-à-dire de leurs contraires ?

— Oui.

— Autre question : n’y a-t-il pas ici, entre tous ces couples de contraires, une double naissance, l’une qui tire l’un des deux contraires de l’autre, et l’autre qui tire celui-ci du premier ? Entre une chose plus grande et une plus petite il y a accroissement et diminution et nous disons que l’une croît et que l’autre décroît.

— Oui, dit-il.

— N’en est-il pas de même de ce que nous appelons se décomposer et se combiner, se refroidir et s’échauffer, et ainsi de tout ? Et si parfois les mots nous font défaut, en fait du moins, c’est toujours une nécessité qu’il en soit ainsi, que les contraires naissent les uns des autres et qu’il y ait génération de l’un des deux à l’autre.

— Certainement, dit-il.

XVI. — Et la vie, reprit Socrate, n’a-t-elle pas aussi un contraire, comme la veille a pour contraire le sommeil ?

— Certainement, dit-il.

— Quel est-il ?

— La mort, répondit-il.

— Alors ces deux choses naissent l’une de l’autre, si elles sont contraires, et, comme elles sont deux, il y a deux naissances entre elles ?

— Sans doute.

— Pour l’un des deux couples que je viens de mentionner, c’est moi, dit Socrate, qui vais parler de lui et de ses générations ; c’est toi qui parleras de l’autre. Je rappelle donc que l’un est le sommeil et l’autre la veille, et que du sommeil naît la veille, et de la veille le sommeil, et que leurs naissances aboutissent pour l’une à s’endormir, pour l’autre à s’éveiller. Trouves-tu cela suffisamment clair ?

— Très clair.

— À ton tour maintenant, reprit Socrate, d’en dire autant de la vie et de la mort. N’admets-tu pas que le contraire de la vie, ce soit la mort ?

— Si.

— Et qu’elles naissent l’une de l’autre ?

— Si.

— Alors, de la vie, que naît-il ?

— La mort, répondit-il.

— Et de la mort ? reprit Socrate.