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Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 1.djvu/306

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MÉLÉNIS. Et moi de même, si je vous donne jamais la main de ma fille.

ALCÉSIMARQUE. Tu me laisseras donc manquer à ma foi ?

MÉLÉNIS. Cela me sera plus aisé que de souffrir qu’on me perde, qu’on me ruine, et qu’on se joue de mon enfant. Cherchez qui voudra croire à vos serments ; mais pour chez nous, adieu panier !

ALCÉSIMARQUE. Mets-moi une bonne fois à l’épreuve.

MÉLÉNIS. Je l’ai souvent fait, et j’en suis assez fâchée.

ALCÉSIMARQUE. Rends-la-moi.

MÉLÉNIS. Vous savez le vieux dicton ? il vient à point : «  Ce que j’ai donné, je voudrais le tenir encore ; ce qui reste, je le garde. »

ALCÉSIMARQUE. Tu ne me l’enverras plus ?

MÉLÉNIS. Mettez-vous à ma place, et faites la réponse.

ALCÉSIMARQUE. Ainsi tu ne veux plus me l’envoyer ?

MÉLÉNIS. Vous savez maintenant ce que j’en pense.

ALCÉSIMARQUE. C’est bien résolu ?

MÉLÉNIS. Je suis toute à mes réflexions, et vos paroles ne m’entrent plus dans l’oreille.

ALCÉSIMARQUE. Non ?… et que faire ?

MÉLÉNIS. C’est à vous de le savoir.

ALCÉSIMARQUE. Que les dieux et les déesses du ciel, de l’enfer, que les demi-dieux, que la reine Junon, fille du souverain Jupiter, que Saturne son oncle…

MÉLÉNIS. Eh ! non, son père…

ALCÉSIMARQUE. Que la puissante Ops son aïeule…

MÉLÉNIS. Pas du tout, sa mère.

ALCÉSIMARQUE. Que Junon sa fille, et Saturne son oncle, et l’auguste Jupiter… Tu me fais perdre la tête, c’est toi qui es cause que je me trompe.

MÉLÉNIS. Continuez.

ALCÉSIMARQUE. Peut-on savoir quelle est ta résolution ?

MÉLÉNIS. Dites toujours. Je ne vous la renverrai pas ; c’est bien arrêté.

ALCÉSIMARQUE. Eh bien donc, que Jupiter, Junon et Saturne, que… je ne sais plus ce que j’allais dire… Ah !… écoute, femme, et tu connaîtras mon dessein : que tous les dieux, grands, petits, et ceux même qui se contentent de nos rogatons, fassent que de ma vie je ne donne un baiser à ta Silénie, si je ne coupe la tête aujourd’hui même, à toi, à ta fille et à moi ; si je ne vous tue l’une et l’autre, demain, au point du jour ; enfin si