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TROISIÈME ENNÉADE.


scène, et de rapporter ainsi à la Raison universelle le bien et le mal qui se font ici-bas ? car la Raison universelle exerce son influence sur chacun des acteurs avec d’autant plus de force que le drame est plus parfait et que tout dépend d’elle[1]. — Mais pourquoi imputer à la Raison universelle les mauvaises œuvres ? Les âmes contenues dans l’univers n’en seront pas plus divines ; elles resteront toutes des parties de la Raison universelle [et, par conséquent, des âmes] : car il faut admettre que toutes les raisons sont des âmes ; sinon, qu’on nous dise pourquoi, la Raison de l’univers étant une âme, certaines raisons seraient des âmes et les autres seraient seulement des raisons[2] ?


  1. Cette objection paraît empruntée à la doctrine stoïcienne qui identifie Dieu avec le monde : « Toutes choses sont liées entre elles et d’un nœud sacré ; il n’y a presque rien qui n’ait ses relations. Tous les êtres sont coordonnés ensemble, tous concourent à l’harmonie du même monde. Il n’y a qu’un seul monde, qui comprend tout, un seul Dieu, qui est dans tout, une seule matière, une seule loi, une raison commune à tous les êtres doués d’intelligence, enfin une vérité unique, n’y ayant qu’un seul état de perfection pour tous les êtres qui appartiennent à la même espèce et qui participent à la même raison. » (Marc-Aurèle, Pensées, VII, 9.) Sénèque est encore plus explicite : « Totum hoc, quo continemur, et unum est, et Deus est, et socii ejus et membra sumus. » (Lettres, 94.) Voy. d’ailleurs les rapprochements entre la doctrine des Stoïciens et celle de Plotin dans les Éclaircissements sur ce livre, à la fin du volume.
  2. Dans cette fin, Plotin indique la question qu’il traite dans le livre suivant, p. 71.