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TROISIÈME ENNÉADE.


ce mouvement[1]. On ne voit pas encore en quoi consiste ce nombre qui mesure selon l’antériorité et la postériorité. En tout cas, ce qui mesure selon l’antériorité et la postériorité, soit par un point[2], soit par toute autre chose, mesure certainement selon le temps. Ainsi, ce nombre[3] qui mesure le mouvement selon l’antériorité et la postériorité doit toucher au temps et y être lié pour mesurer le mouvement. Antérieur et postérieur désignent nécessairement soit des parties diverses de l’espace, comme le commencement du stade, soit des parties du temps. Ce qu’on nomme l’antérieur, c’est le temps qui finit au présent ; et ce qu’on appelle le postérieur, c’est le temps qui commence au présent. Le temps est donc autre chose que le nombre qui mesure le mouvement selon l’antériorité et la postériorité, je ne dis pas seulement un mouvement quelconque, mais encore le mouvement régulier. D’ailleurs, pourquoi aura-t-on le temps en appliquant le nombre soit à ce qui mesure, soit à ce qui est mesuré (car ici ce qui mesure et ce qui est mesuré peuvent n’être qu’une seule chose) ? Pourquoi sans le nombre n’aura-t-on pas le temps, si le mouvement existe avec l’antérieur et le postérieur qui s’y rapportent ? C’est comme si l’on disait que l’étendue n’a telle quantité que s’il y a quelqu’un pour reconnaître qu’elle possède cette quantité. Puisqu’on dit que le temps est infini[4], et qu’il l’est en

  1. Voy. ci-dessus la définition d’Aristote, p. 191, note 1.
  2. C’est une allusion à l’instant présent (τὸ νῦν) d’Aristote : « L’instant présent mesure le temps en tant qu’il est antérieur ou postérieur. » (Physique, IV, XI.)
  3. Le texte porte : ἔσται οὖν ὁ χρόνος οὗτος ὁ μέτρων. Cette leçon est suivie par Ficin et Creuzer. Taylor lit ἀριθμός au lieu de χρόνος et M. Kirchhoff retranche χρόνος, ce qui revient au même. La liaison des idées exige qu’on adopte la leçon de Taylor.
  4. « Le nombre de cette division [selon l’antériorité et la postériorité] n’est pas séparable ; son infinité n’est pas permanente, mais devient toujours, comme le temps et le nombre du temps. » (Aristote, Physique,III, VII.)