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TROISIÈME ENNÉADE.


S’il n’existait pas, rien ne serait, pas même l’Intelligence qui est la Vie première et universelle. En effet, ce qui est au-dessus de la vie est la cause de la vie. L’Acte de la vie, étant toutes choses, n’est pas le premier principe : il découle de ce principe comme d’une source.

On peut en effet se représenter le premier principe comme une source qui n’a point d’autre origine qu’elle même, qui se verse à flots dans une multitude de fleuves sans être épuisée par ce qu’elle leur donne, sans même s’écouler, parce que les fleuves qu’elle forme, avant de couler chacun de leur côté, confondent encore en elle leurs eaux, tout en sachant quel cours ils doivent suivre[1].

    lui, non comme le hasard l’a fait, mais comme il l’a voulu lui-même. Or, sa volonté n’a pas été irrationnelle, ni fortuite, ni accidentelle ; elle a été ce qu’il convenait qu’elle fût, parce qu’en lui rien n’est fortuit. Aussi Platon l’a-t-il appelé le convenable et l’opportun, pour exprimer autant que possible qu’il est étranger à toute contingence, qu’il est ce qu’il était convenable qu’il fût… Il est le convenable, non comme étant sujet, mais comme étant acte premier, lequel s’est manifesté tel qu’il était con comble qu’il fût. C’est là ce que nous pouvons dire de Lui, dans l’impuissance où nous sommes de nous exprimer à son égard comme nous le voudrions. » (Enn. VI, liv. VIII, § 18.)

  1. Synésius a développé une image semblable dans le passage suivant : « Tu es unité quoique trinité ; unité permanente et trinité permanente ; mais cette division, qui ne réside que dans l’intelligence, conserve encore indivisible ce qui est divisé. Le Fils réside dans le Père, et dirige ce qui est du Père, répandant sur le monde les flots de cette vie bienheureuse, puisée à la source même… De là s’échappe le ruisseau de vie que ta puissance fait s’épandre sur la terre à travers les mondes mystérieux des intelligences : c’est ainsi que le monde visible, reflet du monde intellectuel, recueille les biens dont la source est dans les cieux. (Hymnes, IV ; trad. de M. Falconnet.) Saint Athanase se sert d’une comparaison analogue pour expliquer comment le Verbe est engendré : « Il ne faut pas concevoir en Dieu trois hypostases séparées en elles-mêmes, pour ne pas tomber dans le polythéisme comme les Gentils ; mais il faut se représenter un