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LIVRE PREMIER.

pesante que de supposer qu’elle ne s’appartienne pas, qu’elle puisse être entraînée par des mouvements involontaires et agir sans aucun motif. Il faut que la volonté soit excitée ou que la concupiscence soit éveillée par quelque stimulant intérieur ou extérieur. Point de motif, point de détermination[1].

Si tout ce qui arrive a une cause, nous pouvons découvrir les causes prochaines de chaque fait et rapporter ce fait à ces causes. Si l’on se rend à la place publique, c’est qu’on a, par exemple, une personne à y voir ou une créance à recouvrer. En général, toutes les fois qu’on prend une détermination, qu’on accomplit un acte, on a un motif, on croit bien faire. Il est certains faits que nous rapportons aux arts comme à leurs causes, le rétablissement de la santé, par exemple, à la médecine et au médecin. Un homme s’est-il enrichi, c’est qu’il a trouvé un trésor ou reçu quelque libéralité, qu’il a travaillé ou exercé quelque profession lucrative. La naissance d’un enfant a pour cause son père et le concours des circonstances extérieures qui ont favorisé sa procréation par suite de l’enchaînement des causes et des effets, par exemple une certaine nourriture, ou bien encore une cause plus éloignée, la fécondité de la mère[2]. La cause générale, c’est la Nature.

II. S’arrêter une fois qu’on est arrivé à ces causes, et ne pas vouloir remonter plus haut, c’est montrer de la paresse d’esprit, c’est ne pas écouter les sages qui enseignent à s’élever aux causes premières, aux principes su-

    tate, quod esset earum motus certus et necessarius, invenit, quo necessitatem effugeret, quod videlicet Democritum fugerat : ait atomum, quum pondere et gravitate directo deorsum feratur, declinare paululum. (Cicéron, De natura Deorum, I, 25.)

  1. « Il ne faut pas s’imaginer cependant que notre liberté consiste dans une indétermination ou dans une indifférence d’équilibre, etc. » (Leibnitz, Théodicée, I, § 35.)
  2. Pour le développement des mêmes idées, Voy. Enn. II, liv. iii, § 14 ; t. I, p.185.