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TRAITÉ DE L’ÂME.


propre. Cette même doctrine sépare également l’Âme et tous les êtres supérieurs ; elle lui assigne une nature propre[1], en la définissant soit l’Essence intermédiaire entre les corps qui sont divisibles et les genres d’êtres qui sont indivisibles[2], soit la Plénitude des raisons universelles et la Puissance démiurgique inférieure aux idées[3], soit la Vie qui vit par elle-même et provient du monde intelligible et des genres immuables, soit la Procession de l’être véritable et universel vers une essence moins parfaite[4]. Pythagore, Platon, Aristote[5], tous les anciens qui se sont acquis du renom par leur sagesse, sont réellement pour cette doctrine, si l’on approfondit leurs opinions d’une manière scientifique. Pour nous, nous

  1. Tout en critiquant la psychologie de Plotin, Jamblique lui emprunte le fond des définitions qu’il donne ici et qui s’appliquent à la fois à l’Âme universelle et aux âmes particulières.
  2. Au lieu de τῶν μεγιστῶν ϰαὶ ἀμεγίστων σωμάτων γενῶν (tôn megistôn kai amegistôn sômatôn genôn), nous lisons τῶν μεγιστῶν σωμάτων ϰαὶ ἀμεγίστων γενῶν (tôn megistôn sômatôn kai amegistôn genôn). Ce passage est commenté par Simplicius (Comm. sur le Traité de l’Âme, liv. III, 2e partie, préf.) : « L’âme n’est pas l’essence véritable : car tantôt elle pense et tantôt elle ne pense pas. Or, si l’essence suprême de l’âme ne demeure pas pure dans sa procession vers les choses qui occupent le second rang, il en résulte que sous ce rapport aussi elle a une nature intermédiaire, comme le dit Jamblique dans son Traité de l’âme : intermédiaire, dis-je, non-seulement entre les choses divisibles et les choses indivisibles, mais encore entre les choses engendrées et les choses non-engendrées, entre les choses corruptibles et les choses incorruptibles. » Ce passage de Jamblique est également commenté par Priscien (Comm. du Traité de Théophraste sur l’Imagination et l’Intelligence, p. 289 ; « L’âme particulière est donc à la fois muable et immuable, comme le dit Jamblique, en sorte que, sous ce rapport aussi, elle a une nature intermédiaire. En effet, les choses supérieures sont complètement immuables ; les choses périssables sont complètement muables ; mais l’âme particulière, occupant un rang intermédiaire, divisée et multipliée avec les choses qui sont contenues dans le monde, non seulement demeure ce qu’elle est, mais encore change en faisant subsister tant de vies particulières ; elle ne change pas seulement dans ses états, elle change en quelque sorte dans son essence. »
  3. Étant un dieu inférieur, l’âme descend ici-bas dans le but de développer sa puissance et d’orner ce qui est au-dessous d’elle, etc. » (Plotin, Enn. IV, liv. VIII, § 6.)
  4. Voy. Plotin, Enn. IV, liv. VIII, § 6.
  5. Jamblique interprète ici l’opinion d’Aristote sur la nature de l’âme dans le sens de la doctrine néo-platonicienne. Cette interprétation est développée dans un passage où Simplicius s’appuie sur l’autorité même de Jamblique : « Selon Aristote, l’âme est incorporelle, indivisible, immobile par rapport aux mouvements corporels… C’est une raison et une forme ; elle est une dans tous les animaux, même dans ceux qui sont raisonnables : elle possède toutes les essences vitales et toutes les facultés, soit appétitives, comme