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CINQUIÈME ENNÉADE.


ce qui a engendré l’Intelligence et le monde intelligible n’est pas l’Intelligence ni le monde intelligible, mais quelque chose de plus simple qu’eux. Le multiple ne naît pas du multiple, mais de ce qui n’est pas multiple. Si ce qui est supérieur à l’intelligence était multiple, ce ne serait plus le Principe, il faudrait encore remonter plus haut. On doit donc ramener tout à Celui qui est essentiellement un, qui est en dehors de toute multiplicité, dont la simplicité est la plus grande possible.— Mais comment peut naître de l’Un la Raison multiple et universelle, quand évidemment l’Un n’est pas une raison ? S’il n’est pas une raison, comment engendre-t-il la Raison ? Comment encore le Bien engendre-t-il une hypostase dont la bonté soit la forme (ἀγαθοειδὲς (agathoeides)) ? Que possède cette hypostase ? Est-ce l’identité ? Mais quel rapport ce caractère a-t-il avec le Bien ? — C’est que nous cherchons l’identité et la permanence dès que nous possédons le Bien, et qu’il est le principe dont il ne faut pas se séparer : car si ce n’était pas le Bien, il vaudrait mieux l’abandonner. Nous devons donc vouloir demeurer unis au Bien. Puisque c’est là ce qu’il y a de plus souhaitable pour l’Intelligence, elle n’a rien à chercher au delà, et sa permanence indique qu’elle est satisfaite des choses qu’elle possède. Jouissant ainsi de leur présence de telle sorte qu’elle ne fasse qu’un avec elles, elle doit alors regarder la vie comme ce qu’il y a de plus précieux. Si l’Intelligence possède la vie dans son universalité et sa plénitude, cette vie est la plénitude et l’universalité de l’Âme et de l’Intelligence. L’Intelligence se suffit donc, elle ne désire rien ; elle a en elle-même ce qu’elle aurait désiré si elle ne l’eût pas possédé ; elle

    qu’elle doit finir par arriver à l’unité véritable... À mesure que les substances simples descendent, elles s’épaississent, jusqu’à ce qu’elles finissent par se corporifier et par s’arrêter. » (La Source de la Vie, liv. III ; trad. de M. S. Munk, Mélanges de philosophie juive et arabe, p. 39, 57.)