Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/177

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
116
CINQUIÈME ENNÉADE.


peut-il ? C’est ce que Platon nous a laissé à expliquer si nous voulons montrer que nous méritons d’être appelés ses interprètes[1]. Or, voici le point par lequel il nous semble convenable de débuter dans cette recherche.

V. Toutes les productions de la nature ou de l’art sont les œuvres d’une certaine sagesse qui préside toujours à leur création. Seule, l’existence de cette sagesse rend l’art possible. Le talent de l’artiste se ramène à la sagesse de la Nature qui préside à la production de toute œuvre. Cette sagesse n’est pas une suite de démonstrations ; elle forme tout entière une unité ; elle n’est pas une pluralité ramenée à l’unité, mais une unité qui se résout dans une pluralité. Si l’on admet que cette sagesse est la Sagesse première, il n’y a rien à chercher au delà d’elle, puisqu’elle est dans ce cas indépendante de tout principe et qu’elle a son siége en elle-même. Si l’on dit au contraire que la Nature possède la raison [séminale] et en est le principe, nous demanderons d’où elle la tient[2]. Si l’on répond que c’est d’un principe supérieur, nous demanderons d’où ce principe provient ; s’il ne provient de rien, nous nous y arrêterons. Si l’on s’élève enfin à l’Intelligence, nous examinerons si l’Intelligence a engendré la Sagesse. Si elle l’a engendrée, comment l’a-t-elle pu ? Si elle l’a engendrée d’elle-même, elle n’a pu le faire sans être elle-même la sagesse. La Sagesse véritable est donc essence, et vice versa l’Essence est sagesse et tient sa dignité de la sagesse ; c’est pour cela qu’elle est la véritable essence. Aussi, les essences qui ne possèdent pas la sagesse ne sont des essences que parce

    d’appeler des êtres, mais la science telle qu’elle existe dans ce qui est l’être par excellence. » (Platon, Phèdre, trad. de M. Cousin, t. VI, p. 51.)

  1. Voy. ci-dessus liv. I, § 8, p. 19.
  2. Sur les rapports de la Nature et de la Sagesse divine, Voy. Enn. IV, liv. IV, § 11, 12 ; t. II, p. 344-346.