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CINQUIÈME ENNÉADE.


pensée est un acte indépendant des autres pensées, l’Intelligence doit à plus forte raison être toutes choses à la fois, avec cette restriction cependant que chacune d’elles est une puissance particulière. Prise dans son universalité, l’Intelligence contient toutes les essences comme le genre contient les espèces, le tout, les parties. Les puissances séminales mêmes portent l’empreinte de cette universalité. Chacune prise dans sa totalité est un centre qui contient indivises toutes les parties de l’organisme ; cependant la raison des yeux y diffère de celle des mains, et cette diversité se manifeste par celle des organes qui sont engendrés[1]. Chacune des puissances de la semence est donc l’unité totale de la raison séminale quand cette puissance est réunie aux autres qui sont impliquées en elle[2]. Ce qui est corporel dans la semence contient de la matière, l’humide, par exemple ; mais la raison séminale est la forme entière ; elle est identique à la puissance générative, puissance qui est elle-même l’image d’une puissance supérieure de l’âme. Cette puissance générative qui se trouve dans les semences s’appelle ordinairement nature. Procédant des puissances supérieures comme la lumière rayonne du feu, elle dompte et façonne la matière, en lui donnant la raison séminale[3], sans la pousser ni la mouvoir par des leviers.

VII. Les notions scientifiques (ἐπιστῆμαι (epistêmai)) que l’âme se forme des objets sensibles par la raison discursive, et qu’il conviendrait plutôt d’appeler opinions[4], sont postérieures à ces objets (ὕστεραι τῶν πραγμάτων (husterai tôn pragmatôn), a posteriori), par conséquent n’en sont que les images ; mais les notions vraiment scientifiques que la raison discursive reçoit de

  1. Voy. Aristote, De la Génération I, 18.
  2. Voy. Porphyre, Principes de la théorie des intelligibles, § XXXIX, dans notre tome I, p. LXXX-LXXXI.
  3. Sur la Nature, Voy. Enn. III, liv. VIII, § 1-3 ; t. II, p. 211-215.
  4. Sur l’Opinion, Voy. ci-dessus liv. V, § 1, p. 73.