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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/213

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SIXIÈME ENNÉADE.


II. [Substance[1].] Examinons encore si ces dix divisions sont des genres et comment la substance (ὀυσία (ousia)) peut former un genre : car c’est par elle qu’il faut absolument commencer.

Nous venons de dire que la substance intelligible et la substance sensible ne sauraient former un seul genre[2]. Sinon, il y aurait au-dessus de la substance intelligible et de la substance sensible une autre chose qui s’affirmerait également des deux et qui ne serait ni corporelle ni incorporelle : car, si elle était incorporelle, le corps serait incorporel ; si elle était corporelle, l’incorporel serait corporel.

D’abord, qu’y a-t-il de commun à la matière, à la forme et à l’ensemble de la forme et de la matière ? Car les Péripatéticiens[3] donnent également le nom de substances à ces trois choses, tout en reconnaissant qu’elles ne sont pas substance au même degré : ils disent que la forme est plus substance que la matière[4], et ils ont raison ; ils ne soutiendraient pas que la matière est plus substance [comme le font les Stoïciens]. Ensuite, qu’y a-t-il de commun entre les substances premières et les substances secondes, puis-

  1. « Substance a, sinon un grand nombre de sens, du moins quatre sens principaux : la substance d’un être, c’est, à ce qu’il semble, ou l’essence, ou l’universel, ou le genre, ou enfin le sujet. Le sujet, c’est ce dont tout le reste est attribut, ce qui n’est attribut de rien. Examinons donc d’abord le sujet : car la substance, ce doit être avant tout le sujet premier. Le sujet premier est, dans un sens, la matière, dans un autre sens la forme, et en troisième lieu, l’ensemble de la forme et de la matière. » (Aristote, Métaphysique, VII, 3 ; trad. de MM. Pierron et Zévort, t. II, p. 6.)
  2. Voy. Enn. II, liv. IV, § 6-16, où Plotin distingue la matière intelligible, § 2-5, et la matière sensible. Simplicius cite cette objection de notre auteur (Comm. des Catégories, fol. 19, e) et il répond qu’Aristote ne traite ici que de la substance sensible.
  3. Nous ajoutons au texte, pour plus de clarté, le nom des philosophes que Plotin combat ici.
  4. Voy. Aristote, Métaphysique, VII, 3.