Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/278

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
217
LIVRE DEUXIÈME.


nous serions également obligés d’identifier la stabilité avec le mouvement par l’intermédiaire de l’être : de cette manière, le mouvement et sa stabilité ne feraient plus qu’une seule et même chose[1].

VIII. Nous admettrons donc ces trois genres [l’Être, le Mouvement, la Stabilité] parce que l’Intelligence pense chacun d’eux séparément. En les pensant, elle les pose ; et, dès qu’elle les pense, ils existent[2]. En effet, si les choses dont l’existence suppose la matière n’ont pas leur existence dans l’Intelligence (sinon elles seraient immatérielles), tout au contraire, pour les choses immatérielles, être pensées, c’est exister. Contemple donc l’Intelligence pure, appliques-y ton regard intérieur au lieu de la chercher avec les yeux du corps : alors tu vois en elle le foyer de l’essence, où brille une lumière vigilante ; tu vois comment les êtres subsistent en elle unis et divisés ; tu vois en elle la vie permanente, la pensée qui s’applique non à l’avenir, mais au présent, qui le possède déjà, le possède toujours, qui enfin pense ce qui lui est intime et non ce qui lui est extérieur. L’Intelligence pense, voilà l’acte et le mouvement ; elle pense ce qui est en elle, voilà l’essence et l’être : car, en tant qu’existant l’Intelligence pense, elle se pense comme existant, et l’objet auquel elle applique sa pensée existe également. L’acte de l’Intelligence sur elle-même n’est pas l’Essence ; mais l’objet auquel il se rapporte, le principe dont il provient, c’est l’Être. L’Être est en effet l’objet de

    qui soit le même dans ses modes, dans sa durée, dans ses rapports ? Et vois-tu que sans cela quelque connaissance au monde puisse être ou paraître, etc. » (Platon, Sophiste ; trad. de M. Cousin, t. XI, p. 262.)

  1. Ainsi l’être n’est pas le mouvement et le repos pris ensemble ; c’est quelque chose qui est différent, etc. » (Platon, Sophiste ; trad. de M. Cousin, t. XI, p. 266.)
  2. Nous lisons ici avec Creuzer εἴπερ νοεῖ ϰαὶ ἔστιν (eiper noei kai estin), mots qui se trouvent dans les meilleurs manuscrits et qui manquent dans la traduction de Ficin.