Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/391

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
330
SIXIÈME ENNÉADE.

un corps, comme on dit, existait déjà dans l’univers, c’est-à-dire en elle-même, et elle continue d’exister en elle-même quoiqu’elle paraisse être descendue ici-bas. Comment, en effet, l’Âme descendrait-elle ici-bas ? Donc, si elle n’est pas descendue ici-bas, si elle a seulement manifesté sa présence actuelle, sans attendre le corps qui devait participer à elle, évidemment l’Âme demeure en elle-même en même temps qu’elle devient présente à ce corps. Or, si l’Âme demeure en elle-même en même temps qu’elle devient présente à ce corps, [ce n’est pas l’Âme qui est venue dans le corps,] c’est le corps qui est venu en elle ; c’est le corps qui, étant jusqu’alors hors du véritable être, y est entré[1], et a passé dans le monde de la vie (ἐν τῷ τῆς ζωῆς ϰόσμῳ (en tô tês zôês kosmô))[2]. Or le monde de la vie était tout en soi-même, sans étendue, par conséquent sans division. Le corps n’y est donc pas entré comme dans quelque chose d’étendu. Il a commencé à participer, non à une des parties du monde de la vie, mais à ce monde tout entier. Qu’un autre corps y entre encore, et il y participera de la même manière. Par conséquent, si l’on dit que le monde de la vie est tout entier dans ces corps, il est également

  1. « Sic enim oportet dicere quoniam multi in anima corpus esse dicunt ; sed nunc, secundum dicendi usum, anima sit in corpore, etc. » (Victorinus, Contra Arium, I, p. 263, b.)
  2. Ficin commente ce passage en ces termes : « Dicere corpora mundi, quum primum apta sont, sascipere vitale aliquid ex Anima mundi, non prohibet base interim habere proprias animas, quia et has accipiunt illa preparante [Voy. ci-après liv. vii, § 7], et animæ vicissim corpora illius virtute vivificant. Mundus vitæ hic nominatus significat congregationem communionemque mutuam omnium intellectuum intellectualiumque animarum. Anima quælibet intellectualis semper secundum totam substantiam ejus est et in mundo vitæ simul et in mundo corporeo, quamvis hic non cunctas suas vires exerceat. Et quia semper est ibi, per hunc totum excellenter existit ; et quoniam per essentiam hic exstat simul et ibi, ideo non haec ad corpus, sed corpus ad hanc videtur acecdere, quadam videlicet ad illam accommodatione et proprietate formabili. »