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LIVRE SEPTIÈME.

et cette vie parfaite, Celui qui a engendré l’Essence ? Voyez-vous la beauté qui brille dans toutes ces formes si diverses ? Il est beau de fixer là son séjour ; mais quand on est ainsi arrivé à la beauté, il faut chercher d’où procèdent ces essences et d’où vient leur beauté. Leur auteur ne peut être aucune d’elles : car alors il serait seulement quelqu’une d’entre elles et une partie dans le tout. Il n’est donc ni telle ou telle forme, ni une puissance particulière, ni toutes les formes et toutes les puissances qui sont ou qui deviennent dans l’univers ; il doit être supérieur à toutes les formes et à toutes les puissances. Le Principe suprême n’a donc pas de forme (ἀνείδεον (aneideon)) : ce n’est pas qu’il en manque ; c’est qu’il est le Principe dont dérive toute forme intellectuelle. Ce qui est né (si toutefois il est né quelque chose) a dû en naissant être tel ou tel être, avoir sa forme propre ; mais Celui que nul n’a fait ne saurait avoir été fait telle ou telle chose. Il est donc tous les êtres sans être aucun d’eux : il n’est aucun être parce qu’il est antérieur à tous ; il est tous les êtres parce qu’il en est l’auteur. Quelle grandeur attribuer au Principe qui peut tout faire ? Sera-t-il regardé comme infini ? S’il est infini, il n’aura cependant pas de grandeur : car la grandeur ne se trouve que dans les êtres placés au dernier rang. Le créateur de la grandeur ne saurait avoir lui-même de grandeur ; et même ce qu’on nomme grandeur dans l’Essence n’est pas une quantité. La grandeur ne peut se trouver que dans quelque chose de postérieur au Bien. La grandeur du Bien, c’est qu’il n’y a rien qui soit plus puissant que lui, rien qui l’égale. Comment quelqu’un des êtres qui dépendent de lui pourrait-il jamais l’égaler, n’ayant pas une nature identique à la sienne ? Si l’on dit que Dieu est toujours et partout, on ne lui attribue ni une mesure, ni un défaut de mesure (sinon il ne pourrait mesurer le reste) ; on ne lui donne pas non plus de figure.

Ainsi Dieu, étant l’objet du désir, doit être le plus désiré et le plus aimé, précisément parce qu’il n’a aucune figure ni