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CINQUIÈME ENNÉADE, LIVRE I.


Plotin ne définit nulle part ce qu’il entend par hypostase ; mais le sens qu’il attache à ce mot peut se déduire de plusieurs passages où il l’applique à l’Âme, à l’Intelligence et à l’Un.

L’Âme est l’acte et le verbe de l’Intelligence. Elle est la vie qui s’en échappe pour former une autre hypostase. Elle est l’hypostase qui procède de l’Intelligence, et, quand elle la contemple, elle est la raison en acte… L’Intelligence rend l’Âme plus divine parce qu’elle l’engendre et qu’elle lui accorde sa présence. Rien ne sépare l’une de l’autre que la distinction de leur essence. » (T. III, p. 8.)

Puisque l’Un est immobile, c’est sans consentement, sans volonté, sans aucune espèce de mouvement, qu’il produit l’hypostase qui tient le second rang. C’est le rayonnement d’une lumière qui s’en échappe sans troubler sa quiétude, semblable à la splendeur qui émane perpétuellement du soleil sans qu’il sorte de son repos, et qui l’environne sans le quitter. Ainsi toutes choses, tant qu’elles persévèrent dans l’être, tirent nécessairement de leur propre essence et produisent au dehors une certaine nature qui dépend de leur puissance et qui est l’image de la puissance dont elle provient… L’Intelligence est le verbe et l’acte de l’Un… Quand Celui qui engendre est souverainement parfait, Celui qui est engendré doit lui être si étroitement uni qu’il n’en soit séparé que sous ce rapport qu’il en est distinct. » (T. III, p. 13-15.)

« Le Bien demeure en lui-même… Comme son existence (ὑπόστασις (hypostasis)) est en même temps son acte (ἐνέργεια (energeia)), son être (εἶναι (einai)) n’est pas plus selon son acte que son acte n’est selon son être. On ne peut donc pas dire de lui qu’il agit selon sa nature, ni que son acte et que sa vie (ζωὴ (zoê)) se ramènent à son essence (οὐσία (ousia)). Mais son essence et son acte étant intimement unis et coexistant de toute éternité, il en résulte que ces deux choses constituent un seul et même principe, qui dépend de lui-même et ne dépend de nulle autre chose… Comme en lui la chose qui coexiste et celle avec laquelle elle existe ne font qu’un, comme en lui encore ce qui désire ne fait qu’un avec ce qui est désirable, et que ce qui est désirable remplit le rôle d’hypostase et de sujet (ὑποϰείμενον (hypokeimenon)), ici encore nous apparaît l’identité du désir et de l’essence... La première hypostase (ὑπόστασις πρώτη (hupostasis prôtê)) ne consiste pas dans une chose inanimée ni dans une vie irrationnelle… Dieu se porte en quelque sorte vers les profondeurs les plus intimes de lui-même, s’aimant lui-même, aimant la pure clarté qui le constitue, étant lui-même ce qu’il aime, c’est-à-dire se donnant l’existence à lui-même (ὑποστήσας ἑαυτόν (hupostêsas heauton)), parce qu’il est un acte immanent (ἐνέργεια μένουσα (energeia menousa)), et que ce qu’il y a de plus