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CINQUIÈME ENNÉADE, LIVRE I.


leurs facultés raisonnables, elles restent libres et sont récompensées de leurs vertus par le bonheur dont elles jouissent en menant une vie conforme à celle de la divinité ; lorsqu’elles s’abandonnent aux inclinations vicieuses nées de leur commerce avec les choses extérieures, elles en sont punies en devenant esclaves de l’ordre physique de l’univers et en ayant un sort moins heureux dans la génération suivante (t. I, p. 177-187 ; t. II, p. 15-18, 30-52, 57-60, 64-83, 90-101, 290-296, 404-407, etc.).

III. Deuxième hypostase, l’Intelligence. Ce qui constitue l’Intelligence, νοῦς (nous), c’est l’unité consubstantielle de l’Être et de la Pensée : car l’Être est l’Intelligence qui demeure en elle-même, la Pensée est l’Intelligence qui contemple l’Être ; l’Être et la Pensée sont donc identiques. Mais la Pensée n’existe, en tant que Pensée, que parce qu’elle pense l’Être ; l’Être n’existe en tant qu’Être que parce qu’il fait penser la Pensée ; l’Être et la Pensée sont donc différents en tant qu’ils forment une dualité (t. I, p. 259-261 ; t. II, p. 224, 239 ; t. III, p. 10 12). En outre, en tant que la Pensée est acte, il y a mouvement ; en tant que l’Être existe toujours de la même manière, il y a stabilité. L’Être, la Différence, l’Identité, le Mouvement et la Stabilité sont donc les cinq genres dont dérivent toutes choses (t. III, p. 11, 215-219).

L’Intelligence est indivisible, parce que, soit comme Être, soit comme Raison, elle est partout présente tout entière (t. II, p, 254 ; t. III, p. 341-363). Elle est une et infinie : car, étant le lieu de la pensée, τῆς νοήσεως τόπος (tês noêseôs topos), elle contient dans son unité la pluralité des intelligences particulières, qui subsistent en elle avec leur individualité propre et avec lesquelles elle est dans le même rapport que le genre avec ses espèces (t. II, p. 482 ; t. III, p. 237-239, 274, 324-344, 347).

L’Intelligence est immuable, parce qu’elle a une vie permanente, qu’elle possède toujours toutes choses à la fois dans le présent, sans pouvoir rien acquérir ni rien perdre (t. II, p. 228) ; c’est dans cette disposition que consiste l’Éternité (t. II, p. 174-181) ; c’est aussi en elle que consiste l’indépendance de l’Intelligence (t. III, p. 501).

L’Intelligence contient en elle le monde intelligible, qui consiste dans l’ensemble des idées, ἴδεαι, εἴδή, μορφαί, λόγοι (ideai, eidê, morphai, logoi). — 1° Par rapport à l’Intelligence, les idées sont ses actes, ses pensées ou intellections, νοήσεις (noêseis), dans chacune desquelles ce qui est pensé, ce qui pense et la pensée elle-même ne font qu’un seul et même acte, savoir la pensée substantielle, οὐσιώδης νόησις (t. III, p. 40, 141, 394). En effet, par cela seul que l’Intelligence existe réellement, elle pense les essences, οὐσίαι (ousiai), ou êtres véritables, ὄντα (onta), et, en les pensant, elle les fait exister à l’état de natures intellectuelles et vivantes