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Page:Plutarque - Œuvres complètes de Plutarque - Œuvres morales et œuvres diverses, tome 4, 1870.djvu/649

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CONTRE COLOTÈS.

Eudoxe pour les Cnidiens, Aristote pour les Stagirites, rédigèrent un code de lois, et tous les deux étaient disciples de Platon. À Xénocrate Alexandre fit demander des préceptes pour bien régner. Qui fut envoyé vers ce dernier monarque par les Grecs établis en Asie ? Qui l’enflamma et l’excita le plus efficacement à entreprendre la guerre contre les Barbares ? Ce fut Délius d’Éphèse, qui était encore un des familiers de Platon. Je finirai par Zénon[1], le disciple de Parménide. Ayant voulu donner la mort au tyran Demylus, il échoua dans l’exécution. Mais grâce à lui, au milieu des flammes du bûcher, la doctrine de Parménide resta inaltérable et brillante, ainsi que fait l’or. Il montra par ses actes qu’un grand homme redoute l’infamie seule, et que la souffrance ne fait peur qu’à des femmes timides ou à des hommes qui ont des cœurs de femmes : car il se coupa lui-même la langue, et il la cracha à la face du tyran.

33. Parlons de l’influence des discours et des dogmes d’Épicure. Qui ont-ils suscité ? Je ne demande pas que l’on cite de courageux tyrannicides, des guerriers, des législateurs, des conseillers royaux, des défenseurs de peuples, des martyrs de la justice, constants au milieu des tortures et devant la mort. Non : je désire seulement que l’on me dise qui d’entre leurs sages s’est décidé, pour le bien de son pays, à faire un voyage sur mer, à se charger d’une ambassade, à dépenser quelque argent. Quoi ! Parce que Métrodore descendit au Pirée, (c’étaient quarante stades[2] à franchir !) pour aller secourir un certain Mythras, Syrien de nation et un des officiers du roi de Perse, le fait est porté à la connaissance de l’univers entier, on le consigne dans toutes les lettres, et Épicure ne peut trop glorifier, trop exalter ce déplacement ! Qu’eût-ce donc été, si des partisans de cette secte avaient accompli des actes comme nous en avons à citer ! Aristote fonde de nouveau sa ville natale détruite par Philippe ; Théophraste arrache deux fois la

  1. Ce Zénon n’est pas le fondateur de l’école stoïque. C’est Zénon d’Élée, de la secte éléatique. Le tyran qu’il voulut tuer est appelé par d’autres Néarque, ou Diomédon.
  2. Amyot : « environ quatre ou cinq lieues. »