Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 13.djvu/94

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jusqu'à Circée. Là, les pilotes voulant se remettre en mer, Cicéron, soit qu'il en craignît les incommodités, soit qu'il conservât encore quelque espoir dans la fidélité de César, descendit à terre, et fit à pied l'espace de cent stades, comme s'il eût voulu retourner à Rome.

Mais bientôt l'inquiétude où il était lui ayant fait changer de sentiment, il reprit le chemin de la mer, et passa la nuit suivante livré à des pensées si affreuses, qu'il voulut un moment se rendre secrètement dans la maison de César, et s'égorger lui-même sur son foyer, afin d'attacher à sa personne une furie vengeresse. La crainte des tourments auxquels il devait s'attendre, s'il était pris, le détourna de cette résolution : toujours flottant entre des partis également dangereux, il s'abandonna de nouveau à ses domestiques, pour le conduire par mer à Caïète, où il avait une maison qui offrait, pendant les chaleurs de l'été, une retraite agréable, lorsque les vents étésiens rafraîchissent l'air par la douceur de leur haleine. Il y a, dans ce lieu, un temple d'Apollon, situé près de la mer. Tout à coup il sortit de ce temple une troupe de corbeaux, qui, s'élevant dans les airs avec de grands cris, dirigèrent leur vol vers le vaisseau de Cicéron, comme il était près d'aborder, et allèrent se poser aux deux côtés de l'antenne.