Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 5.djvu/338

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il répondait : « Je n’en sais rien. » Il voulait qu’un esclave fût toujours occupé dans la maison, ou qu’il dormît. Il aimait les esclaves dormeurs, parce qu’il les croyait plus doux que ceux qui aimaient à veiller, et qu’après que le sommeil avait réparé leurs forces ils étaient plus propres à remplir les tâches qu’on leur donnait. Persuadé que rien ne portait plus les esclaves à mal faire que l’amour des plaisirs, il avait établi que les siens pourraient voir, en certain temps, les femmes de la maison, pour une pièce d’argent qu’il avait fixée, en leur défendant d’approcher d’aucune autre femme. Dans les commencements, lorsqu’il était encore pauvre et qu’il servait comme simple soldat, il ne se fâchait jamais contre ses esclaves et trouvait bon tout ce qu’on lui servait. Rien ne lui paraissait plus honteux que de quereller des esclaves pour sa nourriture. Dans la suite, quand sa fortune fut augmentée, et qu’il donnait à manger à ses amis et aux officiers de son armée, il faisait, aussitôt après le dîner, donner les étrivières à ceux de ses domestiques qui avaient servi négligemment, ou mal apprêté quelques mets. Il avait soin d’entretenir toujours parmi eux des querelles et des divisions : il se méfiait de leur bonne intelligence et en craignait les effets. Si un esclave avait commis un