Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/225

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la censure sur les femmes, comme gens efféminés, et qui se laissent aller, dans le deuil, à toutes les faiblesses du sexe.

La population d’Athènes s’augmentait chaque jour : il y affluait de toutes parts nombre d’étrangers, attirés par la liberté dont jouissait l’Attique. Mais la plus grande partie du territoire n’offrait qu’un sol ingrat et stérile ; et les marchands qui font le commerce maritime n’apportent rien, d’ordinaire, à qui n’a rien à leur donner en échange. Solon tourna donc vers les arts l’industrie des citoyens, et il fit une loi qui dispensait un fils de l’obligation de nourrir son père, si son père ne lui avait pas fait apprendre un métier. Lycurgue, qui habitait une ville que n’encombrait point une tourbe d’étrangers ; qui disposait d’un grand territoire, et suffisant non-seulement aux besoins d’un grand peuple, mais qui en eût nourri plus de deux fois autant, comme s’exprime Euripide[1] ; Lycurgue, environné surtout, comme il l’était, d’une multitude d’Hilotes, qu’il fallait non laisser dans l’oisiveté, mais fatiguer et comprimer par un travail continuel, eut raison d’interdire aux Spartiates toutes les professions abjectes et mercenaires ; de tenir les citoyens sans cesse sous les armes, et de ne les exercer qu’au métier de la guerre. Mais Solon, qui accommodait les lois aux choses, bien plutôt que les choses aux lois, et qui voyait que le pays, naturellement pauvre, et suffisant à peine à la subsistance des laboureurs, ne pourrait, à plus forte raison, nourrir une populace oisive, mit les arts en honneur, et il chargea l’Aréopage de s’enquérir des ressources de chaque citoyen, et de punir ceux qui vivaient dans l’oisiveté.

Une loi encore plus rigoureuse, c’est celle qui dispensait, au rapport d’Héraclide de Pont, les enfants nés d’une courtisane de l’obligation de nourrir leur père.

  1. Probablement dans quelque pièce aujourd’hui perdue.