Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/257

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ils engagèrent, ils excitèrent Horatius, à revendiquer pour lui-même la consécration. Or, il survint une guerre, qui obligea Publicola à sortir de Rome. Ses envieux firent alors charger Horatius de la dédicace du temple, et ils le conduisirent au Capitole ; car ils désespéraient de l’emporter, Publicola présent. D’autres disent que les consuls tirèrent les lots au sort, et que le commandement de l’armée échut à Publicola, et la consécration du temple à Horatius. On peut cependant conjecturer la vérité, d’après ce qui arriva lors de la cérémonie. Le jour des ides de septembre[1], qui répond précisément à la pleine lune de Métagitnion, le peuple était assemblé au Capitole ; l’assemblée était dans un profond silence, et Horatius, après avoir fait les autres cérémonies, tenait déjà, suivant l’usage, une des portes du temple, et il allait prononcer la prière solennelle de la consécration. Alors le frère de Publicola, Marcus, depuis longtemps debout près de la porte du temple, et qui attendait le moment, lui dit : « Consul, ton fils est mort de maladie dans le camp. » La nouvelle affligea tous les assistants ; mais Horatius, sans se troubler, se contenta de répondre : « Jetez le corps où vous voudrez ; pour moi, je ne prends pas le deuil. » Et il acheva la consécration. Or, c’était une fausse nouvelle ; et Marcus l’avait imaginée pour écarter Horatius. Horatius montra, dans cette occasion, une fermeté admirable, soit qu’il eût reconnu à temps la ruse de Valérius, soit qu’il crût la nouvelle véritable, mais ne s’en fût pas autrement ému.

Même chose à peu près arriva pour la dédicace du second temple. Le premier, bâti, comme on vient de le dire, par Tarquin, et dédié par Horatius, avait été brûlé pendant les guerres civiles. Sylla le rebâtit ; mais ce fut Catulus qui le consacra[2], parce que Sylla fut prévenu

  1. C’est-à-dire le 13 du mois.
  2. La consécration eut lieu en l’an 67 avant J.-C., quatorze ans après l’incendie de l’ancien temple.