Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/499

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camp des Athéniens, où il apprend que Mindare, et Pharnabaze avec lui, se trouvaient à Cyzique[1]. Alors il enflamme le courage des soldats, en leur peignant la nécessité où ils se trouvent de combattre l’ennemi par terre et par mer, et d’assiéger Cyzique même. « Une victoire complète, disait-il, peut seule vous fournir les ressources nécessaires. »

Il embarque donc les troupes, et il va jeter l’ancre près de Proconèse[2]. Là, il ordonne qu’on enferme, au centre de la flotte, les vaisseaux légers, et qu’on prenne garde que les ennemis n’aient aucun soupçon de son arrivée. Il survint, par bonheur, une grande pluie, accompagnée d’éclats de tonnerre et d’une épaisse obscurité, qui favorisa son dessein, et qui en cacha les apprêts. Non-seulement les ennemis ne se doutèrent de rien, mais les Athéniens eux-mêmes, qu’il avait fait embarquer beaucoup plus tôt qu’ils ne s’y attendaient, s’aperçurent à peine qu’ils étaient partis. Bientôt l’obscurité se dissipa ; et l’on aperçut les vaisseaux des Péloponnésiens, se balançant sur leurs ancres devant le port de Cyzique. Alcibiade, qui craignait que les ennemis, à la vue de sa flotte si nombreuse, ne se décidassent à gagner le rivage, donne ordre aux capitaines de n’avancer que lentement ; et, prenant avec lui quarante trirèmes, il se présente devant les ennemis, et il les provoque au combat. Ceux-ci, trompés par cette ruse, et qu’effrayaient fort peu ces quarante navires auxquels ils croyaient avoir affaire, fondent sur les Athéniens, et engagent l’action ; mais, pendant qu’on en était aux mains, les autres vaisseaux arrivent. Les Péloponnésiens, saisis d’effroi, prennent la fuite. Alcibiade, avec vingt de ses meilleurs voiliers, poursuit les fuyards jusqu’à la côte, débarque ses troupes en même temps qu’ils s’élancent de leurs vaisseaux, et fait un

  1. Dans la Phrygie, sur la Propontide.
  2. Île voisine de Cyzique.