Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/551

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Au retour des prêtres, les Romains se décidèrent à se renfermer dans la ville, à défendre les murailles, et à repousser l’ennemi, s’il venait donner l’assaut. Ils mirent leurs espérances dans le temps surtout, et dans les chances inopinées de la Fortune, incapables qu’ils étaient de trouver d’eux-mêmes aucun expédient salutaire ; car la ville était remplie de trouble, de frayeur, de rumeurs sinistres.

Cela dura jusqu’au moment où il leur arriva quelque chose de semblable à ce que dit en plusieurs endroits Homère, et à quoi le commun des hommes refuse créance. Le poëte s’écrie, à l’occasion d’événements extraordinaires et inattendus :

C’est Minerve, la déesse aux yeux bleus, qui lui avait inspiré cette pensée[1] ;


et ailleurs :

Mais quelqu’un des immortels changea mon dessein, en me faisant sentir
Ce que dirait le peuple[2] ;


et encore :

Soit qu’il l’eût soupçonné lui-même, ou qu’un dieu le lui eût commandé ainsi[3].


Tous passages que bien des gens méprisent, comme des opinions insoutenables et des fictions sans vraisemblance, par lesquelles le poëte infirme la loi du libre arbitre. Mais telle n’est point la pensée d’Homère ; car il attribue à notre initiative tous les actes explicables, tout ce qui se fait habituellement et par les sugges-

  1. Odyssée, chant XVIII, vers 158.
  2. Iliade, chant IX, vers 459, 460.
  3. Odyssée, chant IX, vers 339.