par crainte de la puissance de Sertorius ; mais ils gâtaient par-dessous main ses affaires : ils maltraitaient les Barbares ; ils leur infligeaient des punitions rigoureuses, et ils les accablaient d’impôts, au nom de Sertorius. De là des séditions et des révoltes dans les villes ; et ceux que qu’il y envoyait pour apaiser et adoucir les esprits ne revenaient qu’après avoir multiplié les soulèvements, et attisé le feu des séditions déjà brûlantes. Sertorius, poussé à bout, démentit alors sa douceur et sa bonté premières : il se rendit coupable d’une horrible injustice envers les jeunes Espagnols qu’on élevait dans Osca : il fit tuer les uns et vendre les autres.
Perpenna, qui avait plusieurs complices de la conjuration qu’il tramait, y attira Manlius[1], l’un des chefs de l’armée. Ce Manlius aimait un jeune garçon ; et, pour lui montrer toute sa tendresse, il lui fit part du complot, et lui conseilla de laisser là tous ses rivaux, pour ne s’attacher qu’à lui. « Dans peu de jours, disait-il, je serai au faîte de la puissance. » Le jeune homme, qui avait plus d’inclination pour Anfidius, un autre de ses amis, révèle à celui-ci les confidences de Manlius. Aufidius en fut fort étonné ; car il était lui-même de la conjuration formée contre Sertorius, et pourtant il ignorait que Manlius y fut entré. Mais, quand le jeune homme lui nomma Perpenna, Grécinus et quelques autres, qu’il savait être au nombre des conjurés, il fut saisi d’effroi : aussi se mit-il, devant le jeune homme, à traiter ces propos de chimères, l’engageant à ne pas tenir compte de ce que disait Manlius, qui n’était qu’un homme vain et léger. Puis il va trouver Perpenna, lui remontre ce qu’il y a de critique dans la conjoncture, le danger où ils se trouvent, et lui conseille
- ↑ Dacîer corrige ce nom en celui de Manius, et confond le personnage en question avec Manius Antonius, le premier des conjurés qui frappa Sertorius.