Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/676

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vant, ne trouvait rien de prêt. Et, quand lui-même on le voyait rester assis sur son bagage sans proférer une parole, on tenait moins de compte encore de sa personne ; et on le prenait pour un homme bas et timide. Cependant il faisait venir les magistrats, et leur adressait d’ordinaire ces remontrances : « Malheureux ! quittez ces manières dures envers les étrangers : ce ne seront pas toujours des Catons que vous recevrez chez vous. Émoussez par vos prévenances le pouvoir d’hommes qui ne cherchent qu’un prétexte pour vous enlever de force ce que vous ne leur aurez pas donné de bon gré. »

Il lui arriva, dit-on, en Syrie, une plaisante aventure[1]. Comme il approchait d’Antioche, il vit un grand nombre de personnes rangées en haie aux deux bords du chemin. Il y avait d’un côté des jeunes gens vêtus de robes blanches, et de l’autre des enfants magnifiquement parés. Quelques hommes étaient à leur tête, vêtus de blanc et portant des couronnes. Caton ne douta point que tout cet appareil ne le regardât, et que ce ne fût une réception que les villes lui avait préparée : il gronda ceux de ses gens qu’il avait envoyés devant lui, de ce qu’ils ne l’avaient pas empêché, fit descendre de cheval ses amis, et s’avança à pied avec eux. Quand ils furent près de la porte de la ville, celui qui conduisait la cérémonie et qui avait rangé en ordre cette multitude, homme déjà assez âgé, quitta les rangs, et vint au-devant de Caton, tenant dans sa main une baguette et une couronne ; et, sans même le saluer, il lui demanda où ils avaient laissé Démétrius, et à quelle heure il arriverait. Or, Démétrius était un affranchi de Pompée ; et, comme tout l’univers, pour ainsi dire, avait les yeux fixés sur Pompée, on faisait la cour à Démétrius, qui jouissait auprès de son maître d’un crédit bien au-dessus de sa condition. À cette de-

  1. Ce qui suit a déjà été raconté dans la Vie de Pompée.