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Page:Poésies complètes de Robert Burns, 1843.djvu/81

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POÉSIES DE BURNS.

Quant à vos prêtres, je n’en dirai que peu de chose :
Corbeaux et clergé sont un gibier très-difficile à tirer ;
Mais, avec la permission de votre longue barbe,
Vous pourriez vous dispenser de mal parler des magistrats :
Les assimiler à votre bande d’autrefois,
Je dois le dire, est une comparaison qui cloche.
Dans Ayr les esprits badins n’ont plus l’occasion
De crier au bourgrois, comme terme injurieux :
Le conseil ne se dandine plus par la rue
Dans toute la pompe d’une suffisance ignorant ;
Gens qui devenaient éclairés à marchander les houblons et les raisins secs.
Ou acquéraient des vues libérales dans les obligations et saisines.
Si par hasard le Savoir, errant à l’aventure,
Leur avait présenté un rayon de sa lampe,
Et pour une fois les avait amenés au Sens commun,
La plate et lourde Stupidité arrivait obligeamment à leur aide.
.........................
        Combien de temps ce bavardage aurait continué,
Quels combats sanglants auraient eu licu, si des esprits avaient du sang à répandre !
Personne ne saurait le dire ; mais devant leurs yeux
Apparut un éblouissont cortése de fées.
Elles dansaient joyeusement sur le courant étincelant de lumière ;
Leurs costumes variés brillaient aux rayons de la lune ;
Elles marchaient si légèrement sur le cristal des eaux,
Que la glace naissante se courbait à peine sous leurs pieds :
Tandis que les ménestrels faisaient retentir leurs accords parmi elles,
Et que les bardes qui ennoblissent l’âme chantaient leurs chants héroïques.
Oh ! si Mac Lauchlan[1], savant inspirateur des cordes,
Eût été là pour entendre cet orchestre céleste
Quand ils exécutaient avec une fureur de montagnard ses chers strathspeys[2],
Ou quand ils jouaient les airs touchants de la vieille Écosse,
Les joies ravissantes ou les prines saignantes de l’amour,
Comme son oreille de montagnard eût été plus noblement enflammée,
Et même sa main sans égale inspirée d’un doigter plus beau !
On ne pouvait deviner quels étaient les instruments,
Mais c’était l’âme même de la musique qu’on entendait ;
L’harmonieux ensemble retentissait de tous côtés,
Tandis que la simple mélodie se versait attendrissante dans le cœur,
        En avant paraît le Génie du fleuve,
Vénérable chef avancé en âge,
Sa tête blanche couronnée de lis d’eau,
Sa jambe nerveuse ceinte d’herbes marines.
Puis venait le plus aimable couple de tout le rortége,
La charmante Beauté donnant la main au Printemps ;
Puis, couronnée de foin fleuri, venait la Joie champètre,
Et l’Eté, avec son œil aux chauds rayons ;

  1. Célèbre violon écossais.
  2. Danse écossaise.