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Page:Poésies de Schiller.djvu/63

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recommencer mon attaque, mon cheval, effrayé par ces regards de basilic, par ce souffle empesté, recule avec épouvante, et alors c’en était fait de moi.

« Je mets pied à terre, je tire mon épée du fourreau, mais je frappe en vain, nul coup ne pénètre dans cette armure de pierre ; et de sa queue vigoureuse il me jette sur le sol. Déjà je vois sa gueule s’ouvrir ; il s’approche de moi avec ses dents effroyables, lorsque mes chiens, enflammés de rage, se jettent sur son ventre, le couvrent de morsures et, déchiré par la douleur, il pousse d’affreux gémissements.

« Tandis qu’il essaye de s’arracher à ses deux adversaires, je me lève à la hâte, j’observe l’endroit vulnérable et j’y plonge mon épée jusqu’à la garde. Un sang noir coule à grands flots de sa blessure. Le monstre gigantesque tombe et m’entraîne sous lui dans sa chute. Je m’évanouis, et lorsque je revins à moi je me trouvai entouré de mes écuyers, et le dragon était baigné dans son sang. »

Tous les auditeurs applaudissent avec joie au récit du chevalier. Dix fois leurs voix s’élèvent, retentissent sous la voûte et se répètent au loin. Les chevaliers de l’Ordre demandent qu’on couronne le front du héros, le peuple veut le conduire en triomphe ; mais une ride sévère s’imprime sur le front du maître et il commande le silence.