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Page:Poilay - Souvenirs d'un engagé volontaire, 1907.pdf/25

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avaient célébré, pour la dernière fois, la fête de l’Empereur.

Nous étions en effet au soir du 15 août. Dans le désarroi de la défaite, avec le relâchement de la discipline, ils avaient bu sans frein. Je les voyais, par cet éblouissant soir d’été, titubant dans un nuage empourpré qui faisait à cette Kermesse comme un fond d’apothéose.

Voilà donc les hommes avec lesquels j’allais désormais vivre ! Comment allier, dans mon esprit, le sentiment de Patrie, les héroïsmes qu’il comporte et l’obligation de la vie commune avec de pareilles brutes ?

Je voulus pourtant m’en rapprocher, pénétrer leur mentalité. La curiosité me fit surmonter ma répugnance et, avisant un groupe de fantassins d’allures assez calmes, nous liâmes conversation. Ces hommes n’avaient pas encore eu contact avec l’ennemi, mais ils s’étaient déjà repliés. Ils savaient ce que c’est qu’une retraite préci-