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LA VICTOIRE

toutes les pièces. Franklin-Bouillon redoute que tout cela ne favorise une campagne pacifiste.


Lundi 22 avril.

Clemenceau est rentré cette nuit après deux jours de voyage au front anglais. Il est allé jusqu’à Poperinghe. Il a vu Haig et Plumer. Il a trouvé Haig très satisfait d’obéir à Foch. Foch lui a paru en très bonne forme. L’armée anglaise est assez fatiguée, mais confiante et résolue. Malheureusement, elle ne reçoit jusqu’ici que des renforts médiocres, composés d’hommes malingres. Clemenceau se propose d’aller au besoin en Angleterre pour résoudre cette question. Haig a consenti, malgré l’avis du général Wilson, à envoyer les divisions fatiguées dans le secteur français. Clemenceau paraît très satisfait et très heureux que les soldats anglais l’aient accueilli par des hurrahs. Il me dit : « Voici. Je suis venu avec Pichon vous annoncer que le prince Sixte revient. Naturellement, recevez-le, s’il vous demande audience à vous seul. Mais je vous demanderai ensuite de le voir dans votre cabinet avec Pichon ; je ne le tiens pas quitte envers moi. J’ai été accusé d’avoir menti. Il faut qu’il m’aide à prouver que c’est Czernin qui a menti. — Mais, dis-je, son silence même en fait la preuve et il est peut-être difficile de lui demander de témoigner contre son beau-frère, l’empereur Charles. — Les questions de famille ne me sont rien ; il y a la France. Il faut que le prince m’autorise à publier un papier pour établir, qu’il a reconnu l’exactitude de ma publication. Alors, s’il vient, prévenez-le que je désire le voir chez vous. »

J’indique à Clemenceau qu’il y a à la Commission de la Chambre quelque tendance à prétendre que l’occasion offerte par le prince Sixte était très sérieuse et qu’on a eu tort de la laisser