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LA LETTRE DE COMMANDEMENT DE FOCH

échapper. Il me répond que ces insinuations n’ont aucune importance et il reste aussi content de ce qu’il a fait.

Bartholomé, Bonnat, Béraud viennent m’inviter à inaugurer l’exposition du Petit Palais.

Gérardin, directeur de la Compagnie de l’Est, est nommé commandeur de la Légion d’honneur.

Je signe la lettre de commandement de Foch, que celui-ci a réclamée à Clemenceau et qui devrait être, en réalité, donnée par tous les gouvernements alliés.


Mardi 23 avril.

La session des conseils généraux a commencé hier. Presque partout ont été votées des adresses à l’armée, au gouvernement et en particulier à Clemenceau. Seul le conseil des Hautes-Alpes fait allusion au président de la République. Clemenceau avait raison de me dire un jour : « Je suis populaire et vous ne l’êtes pas. » Comment le serais-je ? Tout le monde croit que c’est Clemenceau qui a sauvé Paris et les armées les 24, 25 et 26 mars. Mon action ne s’extériorise jamais. Je ne puis ni prononcer un mot, ni faire un geste ; je suis une âme sans corps. Si par malheur nous subissions une paix mauvaise ou médiocre, toute la honte en rejaillirait sur moi. Je dois ce sacrifice à la Patrie. La légende de Clemenceau est une force nationale. Il faut tirer parti de ses qualités et de sa réputation dans l’intérêt du pays. Il faut tâcher d’atténuer ses défauts et de prévenir ses imprudences.

Conseil des ministres vide et court. Le gouvernement existe de moins en moins en dehors de Clemenceau.

Celui-ci est aujourd’hui en veine de gamineries. La seule question qu’il effleure sans la traiter est celle du ravitaillement des armées alliées. Per-