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LA VICTOIRE

« J’apprécie hautement, monsieur le Président, le télégramme de félicitations que vous avez bien voulu m’envoyer à l’occasion des récentes opérations à Ostende. La marine britannique se joint à moi dans l’expression de nos vifs remerciements pour le témoignage de votre amitié et de votre bienveillance.

George R. I. »


Lundi 13 mai.

Deschanel, moins pessimiste qu’à l’ordinaire, m’affirme que le cabinet Clemenceau est solide à la Chambre. Il ne croit pas que les assemblées parlementaires songent à demander la paix cette année. Mais il ne faudrait pas, selon lui, trop étendre les débats judiciaires, et, comme je lui dis que, dans l’affaire Caillaux, Mornet, d’après Ignace, considère la condamnation comme certaine, il paraît attristé et prononce ce seul mot : « La Folie ! »

Clemenceau me communique dans la journée une lettre intéressante, interceptée par le service des renseignements anglais. C’est une lettre de Ballin, le grand pontife de la marine marchande anglaise. Il écrit à un conseiller privé allemand que la guerre sous-marine a avorté, que l’empire commercial des mers va certainement échapper à l’Allemagne, que l’entrée en ligne de l’Amérique décidera, au profit de l’Entente, du sort de la guerre.


Mardi 14 mai.

Conseil des ministres. Lorsque j’arrive dans la salle, je trouve Clemenceau ganté de gris, comme il a pris l’habitude de le faire depuis quelque temps pour soigner un eczéma et calmer de vives démangeaisons. Il m’explique en riant : « J’ai les mains, comme vous avez le cœur, trop sen-