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Broyés et Somme-Suippes, à un poste de commandement, P. C. « Thérèse » au sud-ouest de Hurlus. Il a plu à torrents toute la nuit, le ciel est encore couvert, l’air est pénétré d’humidité, la campagne est grise et triste. Nous avons devant nous de petits boqueteaux appauvris et des arbres mourants. Malheureux coin de France déjà mélancolique avant 1914 et aujourd’hui ravagé par la guerre !

Du P. C. Thérèse, je fais un tour d’horizon sur les lignes que j’ai parcourues autrefois avec le général de Langle de Cary et le général Castelnau.

Gouraud a réuni un certain nombre d’officiers, de sous-officiers et de soldats du 21e corps, que commandait récemment encore le général Degoutte et que commande maintenant le général Naulin (13e et 43e divisions). Tous ces braves ont déjà plusieurs citations et viennent d’accomplir des faits d’armes que rappelle le général Gouraud. Je me les fais tous présenter individuellement, je les félicite, je les interroge, je remets quelques décorations nouvelles. C’est merveille qu’après quatre longues années de guerre, il y ait encore chez les combattants cette flamme, ce mordant, cette simplicité dans le sublime.

Nous reprenons notre route à travers le paysage gris et nous nous arrêtons successivement au camp de Mourmelon, et à la Veuve. À chaque station, nous trouvons groupés des officiers et des hommes du 4e C. A. (124e et 163e divisions). On m’explique leurs derniers exploits. Je leur serre la main avec effusion. Un tout jeune volontaire de la classe 20 a déjà deux citations et les galons de caporal. Tous paraissent presque étonnés des félicitations qu’ils reçoivent.

Pendant le trajet, Gouraud me parle avec admiration du patriotisme de Clemenceau, mais il con-