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LA VICTOIRE

Deschanel arrive. Je lui apprends, ainsi qu’à Dubost, que, d’après Clemenceau, Wilson se propose de venir pour les préliminaires de paix et que Clemenceau a été, tout de suite, enchanté de ce projet. Sa joie m’a d’abord surpris, mais j’ai compris ensuite, d’après les explications de Pichon, que Clemenceau comptait présider la séance, et présider Wilson, et que c’était là la règle de sa conduite.

Dubost et Deschanel trouvent tous deux qu’il est impossible que Wilson soit présidé par un chef de gouvernement. Deschanel estime, d’ailleurs, que Wilson serait indiscret de venir s’asseoir lui-même autour du tapis vert et qu’on devrait le lui faire comprendre. Mais il est déjà sans doute trop tard puisque Clemenceau s’est entretenu de ce voyage avec le colonel House.

Dubost voudrait que les présidents des Chambres fussent consultés sur tout cela par le président du Conseil. Deschanel déclare, au contraire, qu’il veut rester dans son rôle et ne pas s’attirer de désagréments de la part de Clemenceau. Deschanel souhaite vivement que l’Allemagne ne propose pas d’armistice et qu’on achève de la battre.

Lundi 4 novembre.

Les Italiens ont pris l’offensive et sont allés jusqu’à Trente et à Trieste, où ils ont pénétré. J’adresse des félicitations au roi Victor-Emmanuel III et je lui exprime « la profonde et fraternelle émotion que cause à la France tout entière cette splendide victoire de l’idée latine. »

Aucune nouvelle de Clemenceau. Le matin, j’avais remis à William Martin trois télégrammes à communiquer à Pichon, deux pour le roi Pierre de Serbie et le prince Alexandre, un autre pour le roi d’Italie. Pichon m’avait fait dire que pour ce