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L’ARMISTICE EST SIGNÉ

tout le front, il est sûr que Paris connaîtra la vérité avant la séance de la Chambre. On ne pourra pas garder le secret.

En effet, le maréchal Foch, qui vient à dix heures et demie, m’apprend que Clemenceau a changé d’avis, que le canon va être tiré et que la seule primeur qui sera réservée pour la Chambre sera la lecture du texte. Foch me dit, en outre, que les Allemands ont accepté les conditions qu’il leur a indiquées, mais ils ne se sont pas déclarés vaincus et le pis est qu’ils croient ne l’être point. Foch est, du reste, convaincu que si l’armistice n’avait pas été signé, l’armée allemande aurait été, avant peu, contrainte à une capitulation générale. N’aurait-ce pas été plus sûr ?

Paris est en joie, en fièvre, en délire.

Conseil des ministres à trois heures et demie. En entrant, j’embrasse Clemenceau devant Lemery et Vilgrain, seuls arrivés avec lui. Il me dit : « J’ai été, depuis ce matin, embrassé par plus de cinq cents jeunes filles. » Les ministres arrivent ensuite, puis les sous-secrétaires d’État. Clemenceau dit qu’il a tenu par déférence à réunir le Conseil à l’Élysée avant la séance de la Chambre.

Il ajoute que la victoire est l’œuvre de tous, que chacun, aux postes les plus élevés comme aux plus humbles, a fait son devoir.

Il apprend au Conseil qu’il a pris rendez-vous avec moi pour aller bientôt ensemble à Metz et à Strasbourg. Le Conseil est aussitôt levé, pour que Clemenceau puisse aller à la Chambre lire le texte de l’armistice.

Mardi 12 novembre.

Conseil des ministres. Clemenceau y parle déjà de la démobilisation. Il annonce que les vieilles classes et les agriculteurs seront remplacés au printemps par des indigènes.