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LA VICTOIRE

sonniers. Il reconnaît de bonne grâce qu’il a eu tort de donner une mission à Pasqual et à Charles Bernard. Mais on les confinera à l’ambassade, sous prétexte que leur grandeur les attache au rivage. Clemenceau persiste, du reste, à croire que Pétain exagère les dangers de l’échange. J’insiste sur les observations du général en chef, mais sans ramener, je crois, Clemenceau à l’opinion qu’il avait avant de prendre le pouvoir.

Je signale au Conseil des délibérations pacifistes prises par les syndicats ouvriers de l’Indre et à moi envoyées par eux. Je fais remarquer que c’est une violation de la loi de 1884. Clemenceau en convient et promet que des mesures seront prises. Le président du Conseil ajoute qu’à Londres il a été décidé d’un commun accord de refuser les passeports pour un congrès international socialiste.

Je fais part d’une démarche faite auprès de moi au nom de Malvy par Dalimier, qui est venu me demander jeudi si je consentirais à déposer dans un procès de Haute-Cour. Le Conseil est, comme moi, d’avis que je ne puis déposer. Je parle à Clemenceau de la lettre par laquelle le capitaine Ladoux a demandé l’autorisation de répondre aux attaques des journaux. « Ladoux, me répond Clemenceau, s’expliquera devant le juge d’instruction. »

Il convient avec moi que l’attitude de Goubet n’est pas très nette.

Le marquis de Juigné, député jeune et vigoureux, mobilisé comme lieutenant, attaché à l’état-major du général Maistre, me parle des Italiens avec beaucoup de vivacité. Il les trouve ombrageux et vaniteux. Ils ne sont pas toujours, dit-il, disposés à se battre sérieusement. « Le soldat est bon, l’officier n’existe pas. Beaucoup d’évêques et de prêtres nous sont hostiles, et on favorise