Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 4, 1927.djvu/35

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Aucun dissentiment ne s’est produit entre le gouvernement et lui. M. Doumergue désirerait, me dit-il, le remplacer par M. Maurice Paléologue, directeur des affaires politiques au quai d’Orsay, qui est en ligne pour une ambassade, et nommer à cette direction M. de Margerie, actuellement directeur adjoint, dont il apprécie beaucoup la finesse et l’expérience. Il craint que M. Paléologue ne soit guère tenté par les brumes de la Néva et n’ait plutôt les yeux tournés vers le ciel d’Italie. Mais l’ambassade de Rome n’est pas vacante et, si elle le devenait, MM. Léon Bourgeois et Stephen Pichon se mettraient, sans doute, sur les rangs. M. Doumergue, qui préférerait, de la part de M. Paléologue, une acceptation volontaire à un acte d’obéissance résignée, me prie de l’aider à convaincre son collaborateur. Je le fais venir à mon cabinet. Incontestablement, il manque d’enthousiasme. Il craint d’avoir en Russie la nostalgie de la Méditerranée. Il s’incline cependant de bonne grâce devant le désir de son président du Conseil.


Jeudi 8 janvier

Le Figaro publie ce matin, sous la signature de son directeur, M. Gaston Calmette, un article très vif, où M. Caillaux est accusé de s’être procuré des fonds électoraux par des procédés indélicats. Cette agression n’est ni dans la manière habituelle du journal de la rue Drouot, ni dans celle de M. Calmette, qui a été jusqu’ici le plus courtois des publicistes. Je le connais depuis longtemps. C’est un esprit charmant et délicat. Depuis que s’est formé un ministère radical, auquel il n’est point favorable, il a eu la discrétion de ne jamais plus me venir voir à l’Élysée. J’ignore donc les influences qui ont pu s’exercer sur lui et