Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/321

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ainsi que 60 automobiles. C’est assez, sans doute, pour faire utilement la police dans les départements du nord; ce ne sera pas assez malheureusement pour opérer, sur les derrières de l’ennemi, une diversion décisive. D’après ce que me dit un des officiers de liaison, le commandant Herbillon, le général Joffre espère, du moins, pouvoir employer maintenant, dans la même région, l’ancienne armée d’Amade, à la recherche de laquelle s’est épuisée notre patience et qui vient d’être enfin reconstituée. On en a confié le commandement à un chef qui paraît avoir vaincu le temps, avant de chercher à vaincre l’ennemi. C’est le général Brugère, aujourd’hui retraité, mais toujours vert, malgré son âge, et très satisfait de reprendre du service. Il était loin de s’attendre à ce retour d’activité, en septembre 1913, lorsque nous gravissions ensemble les rues escarpées de sa jolie ville d’Uzerche2. Les territoriaux et réservistes commandés par Brugère ont reçu l’ordre de se retrancher en avant d’Amiens pour appuyer, au besoin, les mouvements de notre aile gauche. Ce n’est plus, en effet, par l’aile droite que le G. Q. G. va chercher une décision ; c’est à l’autre extrémité qu’est transportée la manœuvre. En avançant, ces jours derniers, à travers la plaine de la Woëvre, vers la petite ville d’Étain, l’armée Castelnau s’est heurtée à des forces ennemies si puissamment retranchées qu’on a préféré renoncer, de ce côté, à toute tentative d’enveloppement. Si, d’ailleurs, il avait été possible d’en risquer une, elle aurait vraisemblablement porté à faux et nous aurait détournés d’une opération