Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/352

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a-t-on abusé, sur le front, de « l’arrosage » en dehors des préparations d’attaques ; peut-être aurait-on dû être moins prodigue ; mais, de toutes façons, il est fâcheux qu’on n’ait pas prévenu plus tôt et renseigné plus exactement l’administration centrale.

Millerand me dit qu’après l’évacuation de Douai par les Allemands, on a retrouvé dans la ville 100 000 obus vides de 75, parfaitement utilisables. C’est la preuve d’une singulière négligence.

Le ministre a consulté le général Joffre sur la possibilité d’envoyer à Anvers ou à Ostende la division territoriale du Havre. Le commandant en chef voit des inconvénients à cette expédition ; il la juge vaine et illusoire. Il s’oppose, en tout cas, à ce que le commandement soit donné au général Lanrezac que Millerand a pressenti, mais que Joffre croit responsable des échecs de Charleroi et de Guise. M. Delcassé a déjà annoncé à Anvers l’envoi d’une division. Le gouvernement belge ravi nous a remerciés. D’accord avec moi, le Conseil des ministres est d’avis d’insister auprès de Joffre, pour qu’il soit donné satisfaction à la Belgique. Nous lui devons bien de faire un effort sérieux pour la sauver. Millerand télégraphie à Romilly, où est installé le G. Q. G : « vous comprenez comme nous l’intérêt de premier ordre qu’il y a à répondre dans le plus bref délai et d’une façon efficace à l’appel, aux « supplications » du gouvernement belge ; et vous sentez également que l’effet moral de la chute d’Anvers ne serait pas moins désastreux que l’effet militaire. » Et il demande au général en chef si les objections ne tomberaient pas dans le cas où une partie de l’armée belge de campagne, actuellement retirée à Anvers, sortirait dès