Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/532

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à considérer la guerre de mouvement comme impossible pour longtemps. Ce n’est plus Paris qui est menacé d’être investi ; c’est, de la Belgique à la Suisse, la France qui est assiégée. Faudra-t-il, comme le croit Franchet d’Esperey, chercher en Orient une diversion ?

Après la victoire, le roi Pierre s’est séparé de ses soldats enthousiasmés. Il est rentré dans la retraite et dans la solitude11.

Le Foreign Office nous informe que, dès demain vendredi, le protectorat britannique sur l’Égypte sera solennellement proclamé au Caire12.

Longue conversation de Delcassé avec M. Tit-toni. L’ambassadeur d’Italie surveille d’un œil attentif ce qui se passe dans les Balkans. « Mon pays, dit-il, comprend très bien le vif désir des Serbes de ne pas rester enfermés dans les terres et d’avoir un accès à la mer. Ils ne peuvent obtenir ce débouché sur la mer Noire, puisque Roumains et Bulgares sont installés sur ses rives. Ils ne peuvent le trouver sur la mer Egée, puisque les Grecs sont établis à Salonique. Il ne leur reste donc que l’Adriatique et nous admettons parfaitement qu’ils y accèdent. C’est pour eux une question de vie ou de mort. Mais, d’autre part, personne ne saurait contester l’importance des intérêts qu’a l’Italie dans cette mer. L’Adriatique est pour nous ce qu’est pour vous la Méditerranée occidentale. Aussi espérons-nous que la Triple-Entente ne réglera pas sans nous, dans ses conseils, les problèmes qui s’y rattachent. — Venez dans nos conseils, a répondu Delcassé; vous vous assurerez bien vite qu’on n’y nourrit contre vous aucun méchant dessein. » À quoi M. Tittoni a répondu : « La politique doit de plus en plus nous rapprocher13. »



11. De Nisch, n° 412.
12. De M. Paul Cambon, n° 1211.
13. De