Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 6, 1930.djvu/54

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du ministre des Finances de Roumanie. Il vient de terminer en France une mission d’études auprès du service de santé militaire. Il est, me dit-il, convaincu que la Roumanie se prononcera tôt ou tard pour les Alliés.

Du 9 au 13, je vais, en compagnie de Millerand, visiter les armées des Vosges. Nous partons le mardi soir, par la gare de l’Est, dans mon wagon réservé. Me reconduira-t-il jamais au Clos pour des vacances paisibles ? Joli salon lambrissé, avec incrustations de cuivre, éclairé par de grandes glaces et meublé de fauteuils confortables ; deux cabines voisines, chacune avec un lit, une table et des sièges. Lorsque je suis seul, l’une d’elles est aménagée en cabinet de travail. Mais cette fois, dans cette chambre voisine, j’offre un gîte à Millerand.

Le mercredi 10, au lever du jour, nous nous réveillons dans la vallée de la Vologne. Temps gris, horizon bouché, campagne couverte de neige. Un peu avant neuf heures, nous arrivons à Gérardmer. C’est là que nous attend le général Pütz, commandant de l’armée des Vosges, accompagné du général de division F. Blazer[1]. La fanfare du 11e chasseurs alpins est massée sur la place. Elle m’accueille aux accents familiers de la Sidi-Brahim et de la marche du bataillon. Je vais d’abord rendre visite aux blessés et aux malades. Ils sont soignés dans plusieurs ambulances, dont l’une occupe un hôtel où j’ai vécu naguère, en famille, des heures de repos et de joie. D’une grande véranda, où nous déjeunions alors, Mme Poincaré et moi, nous avions sous les yeux un beau lac bleu ; ce n’est plus main-

  1. V. le récit de cette visite dans Mes souvenirs de montagne, par le général Blazer, édit. B. Arthaud, Grenoble, 1929.